La reconstruction d’un pays ne peut être que l’œuvre des grands hommes disposés à consentir des sacrifices et à mettre de côté toute prétention d’ordre secondaire pour parvenir à un consensus
Haimeda Ould Magha – Des hommes qui peuvent marquer de leurs empreintes « l’Histoire » d’une Nation à travers la recherche d’une unité nationale qu’ils doivent pouvoir gérer à tout prix avec sagesse et intelligence.
À partir d’enseignements tirés de notre passé et de notre présent qui ne peuvent être en aucun cas occultés d’une part, et de par notre religion qui est l’Islam d’autre part, cette unité peut être, ou pourrait être envisagée sous la forme « d’un vivre-ensemble ou de la recherche d’une paix permanente » entre les différentes communautés de ce pays dont chacune a sa culture et ses spécificités qui lui sont propres.
Certes, au-delà de la crise politique, le pays traverse une situation de crise aiguë sans précédent caractérisée par des conflits d’intérêts et d’ordre communautaire qui ne cessent d’ailleurs de s’aggraver.
Çà et là, nous assistons à des soulèvements populaires qui ne sont que l’expression d’une volonté manifeste d’un peuple opprimé, de ces communautés marginalisées, de ces victimes du passif humanitaire sans défense aucune, qui acceptent de sortir de leur hibernation, de ce long silence, pour crier au ras-le-bol.
Un peuple qui, dans toutes ses composantes, aspire à retrouver l’espoir dans un changement par une alternance pacifique. Depuis l’avènement des militaires au pouvoir, ces putschistes qu’il ne faut jamais s’empresser de soutenir quelle que soit la situation dans laquelle peut se trouver le pays, on assiste à une forte régression dans presque tous les domaines, avec surtout, et c’est ce qui est d’ailleurs très grave, la montée en puissance du communautarisme qu’on croyait révolu depuis fort longtemps. Nous rappelons que Feu Thomas Sankara disait dans sa célèbre citation « qu’un militaire sans formation politique est un criminel ».
Est-il nécessaire d’apporter des preuves qui prouvent une telle affirmation ? Je crois que, sans vouloir jeter de l’huile sur le feu, ni vouloir remuer le couteau dans la plaie, ces années de braise de 89 à 91 durant lesquelles l’Élite de toute une communauté négromauritanienne fut sauvagement massacrée, traitée différemment des autres communautés, sont autant d’éléments qui peuvent confirmer une telle affirmation. En tout état de cause, qu’il me soit permis de rendre un vibrant hommage à nos compatriotes revenus d’un exil qui leur était presque « forcé » après tant d’années passées hors de leur pays et à leur tête leur président Mr Thiam samba, pour l’amour et l’attachement portés à ce pays.
Aujourd’hui, ceux qui ne sont nullement tentés par des intérêts uniquement égoïstes ou partisans pourront se rendre compte que les Forces de Libération de Mauritanie (FLAM), aujourd’hui Forces Progressistes du Changement (FPC), ne développent nullement par rapport à ce que soutiennent certains des discours racistes ou extrémistes.
Evidemment, on peut évoquer une question sur laquelle certains de nos politiciens de différentes générations ou de différentes cultures, voire de même génération ou de même culture divergent ou peuvent diverger, et sur laquelle ils doivent s’entendre, à savoir l’histoire de ce pays. Par rapport à cette question, nous jugeons que nous ne devons nullement emprunter au-delà d’une voie pour que nous puissions comprendre et admettre que l’histoire d’une Nation, particulièrement la nôtre, n’est qu’une action humaine d’une certaine époque dont les récits ne sont pas souvent fiables, sinon peu, donc nullement une science exacte et ne suit aucune logique.
Bien sûr, je reste convaincu que je ne possède pas les connaissances requises pour être en mesure de remettre en cause telle ou telle stratégie proposée. Néanmoins, je trouve qu’il est de mon devoir de rappeler à nos concitoyens, y compris ces soi-disant politiciens bien sûr, « qu’avec le temps les erreurs et les mensonges s’écroulent, et que seule la vérité demeure parce qu’elle est dure ».
Toutefois, le paradoxe étant que dans ce pays où chacun d’entre nous constitue à lui seul une école, nous devons comprendre que l’éducation religieuse que nous avons doit nous dicter certaines choses dont au moins le bon sens et le savoir-vivre dans la fraternité et la solidarité.
René Descartes disait d’ailleurs que « le bon sens est la chose du monde la mieux partagée sans distinction des races ni d’ethnies car le principal n’est pas d’avoir l’esprit bon mais de bien l’appliquer ».
C’est d’ailleurs ce bon sens qui doit nous guider pour éviter une énième fois de tomber dans le piège de ces imposteurs qui continuent chaque fois à chercher à nous diviser pour mieux nous dominer d’une part, et d’éviter d’autre part, si ce n’est que pour cette fois-ci, à nos politiciens d’aller vite en besogne, en évitant de se précipiter au moindre signe d’une proposition de dialogue pour donner l’assaut, bien qu’il soit évident pour tous, et même à court terme, que le résultat final qu’on puisse éventuellement obtenir sera sans commune mesure dirigé contre tous.
C’est pourquoi je trouve que la démarche jusqu’ici entreprise par le Rassemblement des Forces Démocratiques (RFD) est salutaire dans la mesure où ce parti doit avoir tiré certains enseignements du passé à partir de l’analyse des résultats obtenus des différentes recommandations tirées des dialogues précédents. Et, sans vouloir aussi trop critiquer, on peut constater jusque-là que les solutions utilisées et expérimentées marchent moins bien et posent même des problèmes dans leur application.
Naturellement, les dirigeants de l’opposition dite « radicale » ou ceux qui se retrouvent au sein du Forum National pour la Démocratie et l’Unité (FNDU), comme d’ailleurs ceux de l’opposition dite « responsable » qui se retrouvent eux aussi au sein de la Convention pour l’Unité et l’Alternance Pacifique et Démocratique (CUPAD), et d’autres tels que ceux qui forment un même bloc avec le parti Arc-en-ciel, Le PMC, doivent comprendre qu’à défaut de pouvoir changer certains de leurs dirigeants, ils doivent nécessairement changer de stratégie politique et reconnaitre, comme disent certains hommes politiques, qu’une alternance ne s’improvise pas et qu’aucun parti politique mauritanien, pris isolément, ne peut parvenir à lui seul à conquérir le pouvoir.
Objectivement donc, pour que le dialogue ait un sens afin qu’il puisse éventuellement déboucher sur des résultats concrets, il doit être abordé avec sérieux par des dialoguistes qui doivent impérativement placer les intérêts de la nation et du citoyen au centre de leurs préoccupations. Impérativement, nous devons trouver des têtes pensantes ayant « une certaine culture », connues pour leur franc-parler.
Des têtes pensantes qui œuvrent pour une Mauritanie réconciliée et qui devront être en mesure de définir le « type » de société dans lequel nous devons nous retrouver. Par contre, nous jugeons que la libération immédiate de tous les détenus politiques (militants et défenseurs des droits de l’homme d’IRA, de Kawtal Yellitaré, et autres) doit constituer une condition sine qua non sans laquelle le dialogue n’aurait nullement de sens, d’ailleurs une condition sans laquelle le dialogue ne doit même pas être engagé entre les différents pôles.
Bref, dans une vision qui nous parait plus ou moins « noble » dans la mesure où elle propose quelque chose de tout à fait nouveau dans la démarche, la manière d’aborder et de conduire le dialogue, nous proposons que celui-ci soit entamé, s’il doit l’être, suivant un ordre chronologique bien établi. Cette vision que nous développons consiste à présenter le dialogue sous deux volets distincts, à savoir : un volet dit « sensible », un volet dit « souple ».
Le premier volet dit « sensible », si ce terme ne fait pas peur aux politiciens, a trait aux questions qui apparaissent aux yeux de certains d’irréalisables, à savoir : l’unité nationale (ou cohabitation), le passif humanitaire, l’esclavage et ses séquelles. Ce premier volet est une « phase test » pour nos politiciens et doit être abordé avec prudence par ceux qui, de par la pertinence des arguments, de par leur capacité de proposer des solutions concrètes au règlement définitif de ces questions, peuvent se comprendre entre eux, emprunter par consensus la même voie pour arriver à une même conclusion.
Ce premier volet qui ne traite que de ces trois questions énumérées précédemment devra prendre beaucoup plus de temps. Tout au long de cette phase, il sera fortement conseillé à notre Élite d’avoir chaque fois à l’esprit que « chaque fois qu’elle se trouve bloquée dans la voie de la synthèse, elle devra comprendre que l’analyse faite est soit incorrecte, soit insuffisante ».
Pour cela donc, ces politiciens (dialoguistes) devront éviter de se retrouver dans le raisonnement par l’absurde qui devient à un certain moment un semblant de dialogue de sourds dans lequel personne ne veut admettre l’idée de l’autre. D’ailleurs, c’est à partir de là que l’on pourra tester la valeur et le degré de dévotion, d’intelligence, de sagesse et de dévouement de notre Élite pour voir à quel point, si nous poussons celle-ci à l’extrême, elle peut parvenir à exercer un réel changement dans nos mentalités que nous ne parvenons pas à transformer depuis plus d’un demi-siècle.
C’est lorsque cette première phase dite volet « sensible » aura été entièrement achevée, réussie, et les que résultats aient été présentés au peuple, que ces politiciens (dialoguistes) pourront s’orienter vers la seconde phase dite volet « souple ». Ce volet « souple » quant à lui prend en compte toutes les autres questions devant être discutées par l’Élite politique.
En somme, il est temps que nous comprenions « qu’il n’y a pas de plaintes qui n’aient occupé plus constamment les bouches, pas de griefs qui n’aient pesé plus lourdement sur les cœurs, que ceux résultant de nos divisions nationales ». Tous interpellés, nous devons agir pour sauver notre Patrie.
Haimeda Ould Magha
Notable de la ville de Rosso
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