Reconnaître les problèmes et les affronter pour les résoudre est un signe de courage et d’honnêteté intellectuelle

La déclaration de l’honorable député national Bram Dah Abeid au sommet de Genève pour la démocratie et les droits de l’homme, déclaration qui décrit des vérités amères de nature à interpeler les âmes et consciences mauritaniennes éprises de justice, de fraternité, d’égalité, de paix sociale et de l’existence même de la Mauritanie, a été malheureusement l’occasion dont certains hauts cadres du pays se sont saisis pour jouer un rôle qui ne me semble nullement s’apparenter au leur. C’est dans ce sens qu’ont pleinement versé de hautes personnalités telles que Gemil Mansour, maîtres Sidi Mohamed Maham et Ahmed Salem Bouhoubeini.

Ces respectables personnalités, au lieu d’avoir le courage et la sagesse de regarder en face les réalités extrêmement difficiles vécues tous les jours et dans tous les domaines de la vie des faibles en général et des communautés et couches placées dans des conditions que connaissent les apatrides, les exclus et les sans droits, ont plutôt abondé dans la vieille tradition de couvrir la vérité et de se substituer aux pouvoirs pour les défendre dans leurs politiques sectorielles impopulaires et totalement contraires aux engagements de la Mauritanie auprès de la communauté internationale ; et ce ,au détriment de l’intérêt supérieur des populations et du développement du pays dans le sens large du terme.

Chez nous, en Mauritanie, ces manœuvres, vieilles comme le temps et dont l’objectif principal est de museler le peuple face aux problèmes brûlants qui l’assaillent, donnent aujourd’hui des résultats tout à fait contraires à ceux qu’elles visent. En effet, aucun, ni Gemil Mansour, ni maître Sidi Mohamed Maham, ni maître Ahmed Salem Bouhoubeini,  n’a, à mon avis,  avancé des arguments et preuves de nature à prouver le contraire des propos tenus par le député Biram Dah Abeid malgré l’état de colère que ces propos semblent les avoir placés. Le seul argument qui leur parait de poids est que ces propos du député Biram devraient être tenus ici en Mauritanie comme jamais ils ne l’ont été aussi bien dans ses meetings  que dans ses interviews et  conférences de presse (exécutions extrajudiciaires des négro africains, pratiques de l’esclavage, discrimination dans les nominations aux postes de hautes responsabilités et même dans les examens et simples emplois)

Cet argument, tout en confirmant bel et bien les propos du député Biram, semble complètement occulter deux à trois faits d’une extrême importance : d’abord,  ne prenant pas en compte que la Mauritanie est un élément de l’univers international, il  la considère comme un électron libre, indépendant, qui évolue en dehors de tout le monde; ensuite, l’on sait que depuis toujours les questions importantes qui concernent les citoyens et l’avenir de la Mauritanie n’ont jamais été accueillies  par des oreilles attentives disposées à les résoudre ; en fin, ce que le député Biram a révélé   s’inscrit parfaitement dans le cadre des provocations et flagrantes injustices qui constituent chez nous le lot de chaque jour. Les privations des libertés individuelles et collectives, la transgression de dispositions constitutionnelles les exactions dont sont victimes les sans voix  sont à cet égard éloquentes.

Par ailleurs, si j’ai  bonne mémoire, l’emploi du vocable apartheid s’agissant de la Mauritanie n’a pas attendu le discours du député Biram le 18/02/2020 pour apparaître mais il a accompagné depuis toujours l’histoire de la Mauritanie indépendante en particulier au cours des régimes militaires, et pourtant, la case n’a , à aucun moment pris feu. Si donc aujourd’hui  l’emploi de ce vocable soulève un tollé au niveau des cadres avertis comme ceux visés plus haut, il y a des raisons qui n’ont pas encore été dévoilées.

En tout cas, je ne pourrai terminer ces paragraphes sans exprimer mon souhait le plus ardent de voir les problèmes posés par les organisations des droits de l’homme connaitre le même dénouement heureux que les graves injustices commises à l’endroit de Mohamed Bouamatou, Mohamed Limame Chavii et Mohamed Debagh. Je ne pourrai non plus terminer sans rappeler que les grands espoirs de changements attendus du pouvoir du président Ghazwani, après une décennie de catastrophes multidimensionnelles, ont, au lendemain de la proclamation des résultats des élections présidentielles, évité au pays de sombrer dans l’inconnu. Il revient donc au président Ghazwani de ne point décevoir ces espoirs du peuple meurtri. Pour ce faire, il doit, à mon humble avis, se prémunir contre les laudateurs et s’orienter vers la volonté politique ferme dont dépendent les changements auxquels l’écrasante majorité du peuple aspire profondément et qui semblent tarder à prendre le bout du chemin.

Nouakchott le, 20/02/2020.

Oumar YALI

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