Note d’alerte. Mauritanie : l’Etat infiltré
Contexte
Le 10 janvier 2020, à l’aéroport de Nouakchott, la police cautionne puis avalise l’entrée, dans le territoire, d’une délégation de la section France de l’Ong interdite Initiative de résurgence abolitionniste en Mauritanie (Ira-M). Quatre personnes la composent. Jean-Marc Pelenc dirige la mission d’information. Au moment où ce dernier s’apprête à rejoindre la ville avec le comité d’accueil local, les hommes en uniforme l’interpellent sur le terrain de stationnement des véhicules et lui signifient son expulsion, par le premier avion, à destination de Marseille. D’après les autorités en charge de la conformité du séjour des étrangers, il figurerait sur une liste de « persona non grata ». Le document demeure confidentiel. Jean Marc Pelenc rentre chez lui ; sa brève visite provoque, en Mauritanie, l’embarras du gouvernement, incapable, pour l’instant, de solder les pratiques liberticides et l’influence du Président sortant Mohamed Ould Abdel Aziz, sur les services de sécurité. Il y a lieu de reconnaitre, au leader de la Commission nationale des droits de l’Homme (Cndh), maître Ahmed Salem Ould Bouhouboiny, la diligence de dénoncer l’abus, aux prémices de sa mise en œuvre.
La persécution des militants de l’égalité et des droits de l’individu se poursuit manifestement, en dépit de l’élection d’un nouveau Président de la république, dès juin 2019. Cependant, signe d’un renouveau, le Ministère des affaires étrangères rassure l’Ambassadeur de France sur une « erreur », tandis que Monsieur Pelenc est invité à revenir, sans frais supplémentaires pour lui. L’incident semblait clos, jusqu’à l’entrée en scène de Madame Mariem Mint Aoufa, diplomate et fonctionnaire statutaire, par ailleurs ex-ambassadrice de Mauritanie à Rome.
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Le lendemain, à 14 heures, en dehors de la moindre instruction reçue de la tutelle – qui dispose d’ailleurs d’un porte-parole – Son Excellence, la Directrice du département Amérique-Asie-Pacifique, publie un tweet, ainsi libellé : « Il est louable ce que les autorités ont fait, en expulsant le juif Jean Marc du journal Charlie Hebdo qui offense la religion islamique en général, le Saint Coran et le Grand Messager, que Dieu le bénisse et lui accorde la paix en particulier, en essayant d’entrer, dans notre pays, par l’aéroport Oum Tounsi. Il est donc bien naturel de chasser la malveillance et ses adeptes, de la terre de lumières et des Almoravides ». La réaction ne comporte rien de bien original si l’on considère la banalité de tels propos, dans un environnement social où l’islamo-arabisme, ses fantasmes, raccourcis et facilités tiennent lieu d’idéologie, de savoir et de rapport au monde. Si l’auteur n’était un membre du personnel de l’administration publique, le propos se noierait certainement dans la banalité et l’impunité des justifications du « négrocide », de l’esclavage, du système de caste et de l’infériorité de la femme.
Interprétation
La judéophobie, réflexe hérité en Mauritanie, se double, ici, d’une promotion du Jihad, de la part d’une employée de l’Etat, dans le domaine, ô combien, stratégique de la diplomatie. Le gouvernement qu’elle représente participe à la force conjointe G5 Sahel et compte, parmi ses alliés, d’Afrique, du Monde libre et de l’ensemble arabo-musulman, des puissances qui collaborent dans le cadre de résistance à la terreur au nom de la foi. L’honorable Mariem Aoufa approuve, in fine, l’attentat contre Charlie Hebdo parce qu’elle adopte les arguments des frères Kouachi, exécutants de la tuerie du 7 janvier 2015, à Paris. Elle l’agrémente d’une incitation à la haine raciale qu’un nazi ne désavouerait et où n’importe quel illuminé trouverait la raison évidente d’assassiner Jean-Marc Pelenc et tout hôte, membre ou sympathisants de l’Ira-M. L’incident révèle – disons confirme plutôt – le noyautage de l’appareil de décision par des zélateurs de la violence religieuse. Ceux-là agissent et s’expriment, au grand jour, parfois avec la complicité de terroristes « repentis ».
Conséquences
Les mots de Madame Aoufa interrogent la crédibilité extérieure du pays ; le problème se présente sous des auspices d’autant moins rassurants que le parti au pouvoir, si l’on en croit son congrès du 28 novembre 2019, abritait un contingent de délégués âpres à réclamer une revanche contre le Français. A divers niveaux de sensibilité sécuritaire, notamment la police criminelle, la magistrature, la diplomatie et les renseignements, la Mauritanie abrite des sympathisants spontanés de l’extrémisme, produits de trois décennies d’hostilité aux langues étrangères. La menace vient, à présent, du cœur de l’entité en charge de protéger, sur le sol national, les citoyens et les ressortissants d’ailleurs. Aujourd’hui, il convient d’admettre la faille et la traiter, sans atermoiement ni paranoïa, avant de devoir payer le prix lourd de sa duplication. Le nouveau gouvernement dispose des outils d’enquête et ne saurait donc s’exonérer de l’action requise, au prétexte de n’avoir su, à temps. L’histoire rappelle à quel degré de ruine mènent le racisme et la répulsion envers un humain, du seul fait de sa différence. Les grandes tragédies commencent souvent en petites phrases.
Nouakchott, 13 Janvier 2020
Commission de communication