Bulletin d’information n°8: Résumé de la première journée du procès des cadres d’IRA
Serait-ce un hasard que le procès des militants d’IRA (13+10) se soit ouvert un 3 août, jour anniversaire du plus récent mais peut être pas le dernier des coups d’Etat du Général? Un autre coup d’Etat, cette fois contre les droits des gens et la morale politique?
La journée a commencé par le bouclage du périmètre du Palais de Justice par la Police. Toute personne dont on suspectait l’appartenance à IRA est proprement empêchée de s’approcher du bâtiment surtout si cette personne était habillée comme le sont les membres du Comité de la Paix. Quand la foule de militants d’IRA a commencé à grossir, ordre fut donné aux forces de l’ordre de la repousser à l’Est jusqu’au carrefour Madrid, au Sud jusqu’à la CUN et à l’Ouest jusqu’à l’immeuble de la BMCI. Là, loin des regards des caméras et notamment des caméras étrangères, les coups de bâtons, de matraques et de rangers ont commencé à pleuvoir sans justifications ni raisons apparentes. Rapidement on a commencé à relever les blessés, nombreux dont des femmes (Mariem Mint Cheikh, Toutou Mint Sidi…). Parmi les blessés, on identifie Mohamed Lemine (fracture de la main), Mahfoudh (fracture du bras), Elhadj Ould Eliid, tombé dans le comma et transporté à l’Hôpital où aucun soin ne lui fut prodigué.
A l’intérieur de la salle d’audience, les jeunes cadres d’IRA avaient pris place, dès 8 heures, dans le box des accusés assistés par leur Collectif de défense. On leur reproche d’avoir pris part aux événements de la Gazra. Ce n’est que trois heures plus tard, vers 11 heures, que la Cour fit son entrée et essaya d’ouvrir la séance dans une salle presque déserte où les quelques policiers en civil n’arrivent pas à tromper les observateurs étrangers venus assister au procès.
Très vite, la défense souleva cette question de l’absence du public qui constitue une condition essentielle à toute justice digne de ce nom. Finalement le Président accéda à cette requête et autorisa le Chef de file du Collectif, le Doyen Cheikh Ould Handy, et un autre avocat membre de ce même collectif, Maître Teyib Ould Mahmoud, à aller chercher le public en leur affirmant, comme le lui a soufflé le policier de service, que ce dernier ne s’était pas présenté! C’est ainsi, finalement, que les quelques rares supporters d’IRA, qui étaient parvenus à franchir la succession d’obstacles policiers et qui sont restés jusqu’à 11 heures, ont pu accéder à la salle. Parmi les obstacles, il y avait l’allégation que les badges étaient épuisés alors qu’en guise de badges, il s’agissait juste de simples feuilles blanches tamponnées!
Après la déclinaison des identités de prévenus, la défense a soulevé un ensemble de vices de forme dont:
1- le fait que la police soit, dans cette affaire, juge et partie. La police prétend avoir été agressée et c’est cette même police qui mène l’enquête et signe les procès verbaux! En plus l’enquête a été menée sans instruction du Procureur de la République qui ne savait même pas qu’il y avait des détenus membres d’IRA;
2- Les prévenus ont été arrêtés et incarcérés sous l’accusation de flagrant délit relatif à l’affaire dite de la Gazra de Ould Bouaamatou. Or aucun d’entre eux ne fut arrêté le jour même du supposé délit ni sur les lieux de ce dernier! Pour un “flagrant” délit, cela pose question.
Après ces fortes objections de forme, la partie civile (Bilal Ould Dik, Nema Ould Ahmed Zeidane et Ahmed Vall Ould Barka) a avancé quelques vagues réponses un peu décousues et gênées aux entournures. Une autre bizarrerie de ce procès est le fait qu’au moins l’un des avocats de la partie civile avait signé aussi pour défendre les accusés!
A 19 heures, alors que le Procureur s’apprêtait à intervenir, la séance a été levée et rendez-vous a été donné le lundi 8 août à 10 heures.
Nos pronostics
S’il existait une justice sur terre, le procès serait annulé pour cause de l’impossibilité physique du flagrant délit. Un non lieu serait alors prononcé lundi 8 août et les prévenus seraient relaxés avec les excuses qui leur seraient présentées et le versement des dommages et intérêts pour préjudices moraux et matériels;
S’il n’y avait pas de justice du tout, le procès reprendrait par une reprise des auditions des prévenus mais cette fois par la gendarmerie en supposant que ce corps soit honnête et indépendant de celui de la police;
Si le procès était de pure forme, la Cour éluderait les objections soulevées par la défense pour prononcer le verdict déjà préparé par l’Exécutif à savoir la condamnation des prévenus pour des délits qu’ils n’auraient pu commettre et des accusations sans fondement aucun. La confrontation entre IRA et le Pouvoir continuerait alors et le Pouvoir perdra encore une fois et ce aussi bien au plan intérieur qu’au niveau de l’opinion internationale.
La Commission de Communication Nouakchott le 04 août 2016