Allocution de Biram Dah ABEID, président d’IRA-Mauritanie, devant la septième plateforme de FrontLine Defenders
Allocution de Biram Dah ABEID, président d’IRA-Mauritanie, devant la septième plateforme de FrontLine Defenders qui se déroule à Dublin du 09 au 11 octobre 2013.
– Monsieur et Madame, le président et la directrice de FrontLine Defenders
– Messieurs et mesdames les représentants du gouvernement Irlandais
– Mesdames et messieurs les représentants du corps diplomatiques
– Mesdames et messieurs les représentants des organismes internationaux et sous-régionaux
– Mesdames et messieurs les représentants des ongs internationales des droits humains
– Chers amis défenseurs des droits humains de tous les coins du monde
– Aimables congressistes :
Je vous apporte le message de reconnaissance de la part des membres de mon organisation IRA-Mauritanie, et ce en souvenir de votre soutien indéfectible à nos dirigeants et militants, pris dans un environnement d’hostilité rigide et grandissante, marquée par la poursuite de l’interdiction de notre ong, la privation d’emplois dans les secteurs public et privé, les harcèlements en tout genre, ainsi que les agressions, les tabassages, les arrestations et les emprisonnements ; à la moindre manifestation non violente de notre part, les appareils sécuritaire et judiciaire mauritaniens nous objectent la coercition brute ; à leurs yeux d’oppresseurs rétifs au changement, réclamer l’égalité raciale et de naissance entre les citoyens constitue un tabou absolu, dont la violation appelle le châtiment. Oui, demander l’application des lois pénalisant l’esclavage, contre les personnes issues du groupe dominant arabo-berbère, pose problème à l’Etat dont les dirigeants et les élites procèdent de ce même système que l’opinion internationale les oblige à condamner de façade. C’est de ce dilemme absolu que provient notre répression en tant que groupe social, en conflit ouvert et frontal avec la reproduction de l’injustice.
A ce propos ma pensée va tout de suite du coté de la ville mauritanienne, Rosso, où sont embastillés, depuis le 30 septembre 2013, deux militants d’IRA, Abdallahi Ould Hmeyid et Slama Ould Seyid, tous les deux punis d’avoir participé à une manifestation pacifique pour l’application de la loi criminalisant l’esclavage en Mauritanie. Le rassemblement intervenait après la plainte qu’une victime d’esclavage, Noura Mint Aheymed, 18 ans, soutenue et assistée par IRA, a introduite à la brigade de gendarmerie de Boutilimit(ville à l’Est de Nouakchott. les frères auteurs, Sidi Ould Ely Mhaymed, Cheikh et Amar, respectivement , homme d’affaires et homme politique membre du parti au pouvoir et le reste de leur famille sont à ce jour impunis .Noura a été arrachée, à sa mère, à l’âge de 4 ans; depuis lors, elle vit sous le joug des corvées – de jour comme de nuit – des corrections corporelles ainsi que de l’ignorance et la solitude ; en effet, durant quinze années, elle a été privée d’école , de chaleur et de consolation parentale. A l’instar des autorités supérieures en Mauritanie, promptes à s’opposer à l’application de la loi sur l’esclavage et à protéger les esclavagistes, Ahmed Ould Ghalla, officier gendarme chargé de recevoir les plaintes et le juge Ould Rabbani préposé à l’instruction, s’empressèrent de détourner l’affaire en falsifiant la déposition de la victime. Devant une telle supercherie, IRA-Mauritanie mobilisa une partie de ses militants pour un sit-in permanant devant la brigade de gendarmerie en question.
La réponse du pouvoir en place en Mauritanie fut la répression violente de nos militants qui subissent, depuis plus d’un mois, les assauts de la police et de la gendarmerie ; celles-ci i tentent de faire taire nos revendications pacifiques, légales et légitimes, par la violence, l’intimidation et la prison ; en plus des deux militants toujours emprisonnés, je souligne que d’autres membres d’IRA ont été grièvement blessés, le 6 octobre courant lorsque des unités de police et de gendarmerie ont pris d’assaut le lieu du sit-in utilisant, non sans zèle, les matraques, les bâtons, les coup de pieds et de poings ainsi que les bombes lacrymogènes. Suite à cette agression, Baba Traoré, Sabbar Ould Mousse, Cheikhna Ould Mahmoud et Namoury Ould Bilal ont été hospitalisés.
Chers amis, nous sommes très bien placés pour témoigner de l’efficacité des appels urgents, du lobbying diplomatique et autres actions que FrontLine met en œuvre au profit des défenseurs des droits humains, en danger de par le monde.
Nous sommes satisfaits que FrontLine, comme toutes les autres organisations non-gouvernementales et les organismes internationaux, ainsi que Etats démocratiques dans le monde, adresse de plus en plus un regard critique sur le forfait de l’esclavage et du racisme envers 80% de la population mauritanienne ; des populations dont le seul tort est de naitre noires, de descendre d’esclaves et d’anciens esclaves; Il s’agit pour ces ongs, ces institutions et ces Etats, de peser de tout leur poids diplomatique, contre la persécution des défenseurs des droits humains, un exercice où la Mauritanie est passée championne, ces dernières années ; déjà, en 2012, sept membres d’IRA, dont moi même, avions été inculpés de trois crimes passibles de la peine de mort, pour avoir protesté contre l’esclavage par l’incendie volontaire d’exemplaires du code d’esclavage négrier que nos écoles religieuses enseignent encore et que les groupes et segments qui nous dirigent, continuent à appliquer à plus de 20% de notre communauté, les Hratin.
Notre combat est le votre. Poursuivons-le, ensemble, pour une humanité d’éthique et d’équité.
Je vous remercie.
Dublin, 10 octobre 2013